20 Décembre 2017
Corpus :
Confère texte d’Edgar MORIN, Commune en France. La métamorphose de Plozévet, Paris, Fayard, 1967, pp.168-169.
I – Les normes dans la situation de la femme selon Edgar MORIN.
Les normes présentent dans les sociétés où la situation des femmes est d’actualité, sont de plusieurs types. Ainsi nous avons : le comportement et la pression sociale. Ces normes agissent ici de façon symbiotique. C’est cette symbiose qui, de façon forte ou subtile concoure à cette considération que l’auteur fait de la femme : la femme, agent secret de la modernité. Pourquoi l’expression ‘’agent secret de la modernité ?’’ Parce que la femme, semble-t-il, est une personne qui secrètement aspire ou est aspirée par un vif désir de mettre, si nous pouvons le dire, un terme à certaines dérives qui font obstacle à sa pleine éclosion. En présupposant, ces normes concourent à attribuer à la femme certaines dispositions s’assimilant à la subordination ou alors à l’assujettissement. En effet, dans une société à caractère traditionnelle – puisque tout par de là – la femme est dépourvue de plusieurs aspects lui empêchant de s’affirmer pleinement. Parmi ces aspects, nous avons celui de la servitude. C’est cette servitude de la femme que Morin appelle : « femme ancillaire » parce que, de par son étymologie latine ‘’ancillaris, de ancilla : servante’’, dénote une femme-servante ou pour dire mieux une femme en servitude. Lorsqu’il affirme : « elle est debout tandis que l’homme est assis, sert à boire sans boire elle-même, attend que son mari lui donne la parole, ne le contredit jamais », il voudrait mettre en lumière le rôle attribué à la femme : elle est corollaire à la servitude. Et c’est de cette corrélation qu’elle s’affirme et se définit. Elle devient par ce fait un objet de servitude.
Dans un ménage, la femme est muette malgré le fait qu’elle soit le moteur, un moteur rendu inerte, puisque c’est elle : « qui nettoie la maison, fait la cuisine, soigne les bêtes, apporte son concours au champ ». Par ailleurs, c’est elle qui gère le capital, s’occupe des enfants et ‘’sert’’ son mari dans la chambre. De là, on fait face à une ambivalence que nous qualifions à juste titre de contradictoire car la femme est en même temps la maîtresse-servante, deux extrémums qui s’opposent et qui cohabitent. Mais là ne se limite pas la thèse d’Edgar Morin.
Ascèse de normes d’après Morin.
La persistance de ces extrémums met la femme à un état d’insatisfaction, de mécontentement ; une non-satisfaction sur la croissance dans son être et la croissance de l’exploitation sur la vie de campagne. Nous avons ici deux facettes qui font surface. La première est celle d’un agriculteur qui « pour acquérir les moyens de modernisations de la maison, doit moderniser l’entreprise ». En d’autres termes, l’acquisition des ingrédients susceptibles de rendre moderne le ménage dépend du risque ou du défi qu’il voudrait atteindre ou qu’il atteint (objectif). La deuxième facette est celle d’un « jeune agriculteur moderne » cherchant un ’’vaccin’’ capable de guérir la femme en l’octroyant une certaine aisance qui lui permettrait d’échanger, telle une marchandise, sa servitude contre ce que Morin appelle : « un métier gestionnaire ». En guise d’exemple, il cite : la comptabilité, secrétariat, la surveillance. C’est alors que survint un problème, celui de la désertification de la majorité des jeunes filles qui par la suite provoquera à son tour celui des hommes. En effet, le troc dont l’auteur mentionne ici permettrait à la femme de stipuler pour la possession d’une activité qui lui permettrait d’échapper, ne fusse qu’en partie voire même totalement, les normes traditionnelles qui font d’elle un objet de servitude. On assiste ici à un dépassement constitué d’une suite de continuité et de rupture. Le véritable problème à l’assouvissement des lacunes ou des envies est l’homme statique’ incapable de mieux cerner la femme. En modernisant tout, il sort premièrement victorieux d’une longue guerre, d’un défi économique qui, deuxièmement, permet à la femme de se moderniser, d’acquérir le sens de la vie meilleure. Cette modernisation de la femme nous emmène à penser à une mutation, une transformation, une métamorphose sur un plan un peu plus général et singulier par rapport au paysan dont la stabilité demeure (problème psychologique).
Edgar Morin conclut donc que : « c’est qu’en opérant la modernisation de l’intérieur (domestique), la femme accomplit sa modernisation intérieure (psychologique) ». Elle nettoie, borne son territoire à ce que l’auteur nomme : « un no man’s land » qui présuppose un assujettissement, une domination absolue et sous-entend une autonomie et une liberté. L’auteur présente ici une femme épurée de toutes normes traditionnelles (indécentes), une femme dont la modernité a transmis certains gênes, certains symptômes qui permettraient à ce qu’elle s’affirme pleinement, loin de toutes contraintes et aspirant à un futur encore plus meilleur.
Conclusion.
En définitives, les normes sociales, après repérage, s’appliquent aux mœurs, aux coutumes et aussi aux préférences personnelles (normes par ordre de pression sociale selon Guy Rocher). De plus, elles suivent une dynamique de systèmes de rôles, un passage de la domination des rôles, généralement attribués, dans les sociétés traditionnelles à l’introduction des changements : traditions ̶˃ modernité.